Des cartes de Noël vraiment cheloues…
Vous vous souvenez des cartes de la Saint-Valentin d’un goût douteux dont on avait parlé ici ? Et des cartes pour draguer dans la rue, tout aussi discutables, ici ?
Hé bien sachez que les fêtes de fin d’année, à la fin du XIXe, n’étaient pas en reste : c’était aussi le bon moment pour s’échanger de jolies cartes de voeux, et en plus des scènes religieuses, ou paysages enneigés, des Pères Noël ou des mignons petits enfants déballant leurs cadeaux au pied du sapin, on en trouvait d’autres, qui avaient de quoi vous faire lever un sourcil perplexe.
Vous allez voir, c’est pas piqué des vers…
L’habitude d’offrir des cartes de voeux
Offrir ses voeux en fin d’année est une tradition immémoriale. En général, c’est plutôt au Nouvel An, puisqu’on va se souhaiter plein de bonheur et de prospérité pour la nouvelle année qui commence, mais ça s’étend aussi à l’ensemble des fêtes de fin d’année (les anglo-saxons appellent cette période Christmastide, c’est à dire « le temps de Noël » ou « le temps des fêtes » qui va de Noël jusqu’à l’Épiphanie le 6 janvier).
Ces voeux pouvaient être oraux, ou bien sous forme d’offrandes ou de moments de partage (je vous renvoie par exemple vers les traditions du wassail, ici, ou encore du baiser sous le gui, ici), tandis que les plus riches et éduqués envoyaient leurs voeux au travers de leur correspondance habituelle. Il y a bien eu quelques illustrations élégantes envoyées à de grands personnages (on a retracé une carte de Noël datant de 1611, envoyée au roi James Ier), mais ça restait anecdotique.
En fait, on considère que la première carte de Noël de grande distribution a été « inventée » en 1843 par un certain Sir Henry Cole. Ce n’est pas un hasard. Certes, le monsieur voulait s’éviter la peine d’écrire une lettre individuelle à tous ses parents, amis et collègues. Mais surtout, trois ans plus tôt, en 1839, il participait à la mise en place du Penny Post, un tarif postal unique et abordable pour livrer du courrier dans toute le Royaume-Uni. Je rappelle qu’avant ça, le prix du courrier se décidait en fonction de la distance, il devait être payé par le destinataire et non par l’envoyeur, bref : ça restait cher et limitant (voyez tous les détails ici). Comme le nouveau timbre-poste à 1 penny rend le service postal bon marché, les conditions sont maintenant favorables pour envoyer facilement des cartes de voeux à ses proches. Sir Henry Cole va donc au bout de son idée en mettant en vente des cartes imprimées.
La mode est lancée, elle ne fera que se développer par la suite dans toute l’Europe, et à partir des années 1870 en Amérique…
Un peu, beaucoup de créativité !
Les premières cartes de Noël représentent plutôt des scènes de festins, de fées, des chérubins ou des fleurs qui rappellent le printemps à venir… Certaines ressemblent même furieusement à des cartes de la Saint-Valentin. De plus, on est à une époque où les gens sont fascinés par la nature et le règne animal, qu’ils étudient beaucoup (ce sont les belles années de Darwin et de tous les naturalistes et autres collectionneurs d’insectes), et on trouve dans ces illustrations beaucoup d’animaux, qu’ils soient dans leur état naturel ou anthropomorphisés. C’est plus tard, vers la fin du siècle seulement, qu’apparaîtront les sujets religieux, les scènes hivernales, puis le Père Noël.
Mais, dans l’intervalle, les illustrateurs se lâchent. Il n’y a pas de conventions, pas de standards établis, pas d’attentes de la part du public puisque tout ça est encore très nouveau, alors ils ont le champ libre ! Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils étaient inspirés…
Je vous mets ci-dessous une petite sélection, mais je vous recommande aussi d’aller faire un tour sur les sites Bored Panda, Daily Mail, Joyenergizer ou Pinterest pour en voir d’autres.
Une morale douteuse
À table !
Sujets animaliers
C’est Noël ou bien la Saint-Valentin ?
De quoi faire peur aux enfants
En conclusion
Creepy, n’est-ce pas ? Et drôle, aussi ! On se demande vraiment ce qu’ils avaient comme cahier des charges, ces illustrateurs !
En fait, comme souvent, il y avait une part de recyclage : les producteurs de cartes réutilisaient des images déjà existantes, même si ces dernières n’avaient rien de particulièrement festif. Je me demande même dans quelle mesure ils ne réutilisaient pas des stocks d’invendus en réimprimant par dessus un simple « Joyeux Noël » pour les refiler à nouveau, tellement on a l’impression que pour certaines cartes le texte n’a pas été conçu en même temps que l’image. Mais sinon, il y avait aussi probablement une bonne part de liberté, et un humour spécifique à l’époque.
En tout cas, si ça vous a donné envie d’envoyer une carte de Noël virtuelle – et cheloue -, vous pouvez utiliser le site Weird Christmas. Et n’oubliez pas de revenir nous dire dans les commentaires la réaction des personnes à qui vous les aurez envoyées ! 😉
SOURCES :
Wikipedia - Christmas card
Podcast - Art Matters podcast: weird, dark and wonderful Victorian Christmas cards
57 Victorian Christmas Cards That Are As Creepy As Those Times Themselves
The eye-opening (and very creepy) Christmas cards loved by the Victorians
10+ Victorian Christmas Cards That Are As Creepy As Those Times Themselves
Pinterest - Creepy victorian Christmas cards
The history of creepy victorian Christmas cards
10 Strange Christmas Traditions From The Victorian Era
Weird Christmas - Send a Christmas card
YouTube - Some WEIRD Victorian Christmas Cards
YouTube - Weird Victorian Christmas Cards