Époque georgienne,  Époque Régence anglaise

Le nombre d’enfants

Il y a des trous, dans Orgueil et préjugés. Littéralement.

À la défense de Jane Austen, il faut se rappeler qu’elle travaillait son manuscrit à la main, avec une paire de ciseaux pour couper dans le texte. De plus, il s’est écoulé quinze ans (!!!) entre la première écriture du roman et sa révision avant la publication, période à laquelle elle a apporté plusieurs modifications. Fort possible, donc, qu’elle ait omis des détails par inadvertance.

En relisant le roman, l’un d’eux m’a sauté en pleine figure. Je cite :

Et bientôt se répandit la nouvelle que Mr. Bingley amènerait avec lui douze dames et sept messieurs. Les jeunes filles gémissaient devant un nombre aussi exagéré de danseuses, mais, la veille du bal, elles eurent la consolation d’apprendre que Mr. Bingley n’avait ramené de Londres que ses cinq soeurs et un cousin. Finalement, lorsque le contingent de Netherfield fit son entrée dans la salle du bal, il ne comptait en tout que cinq personnes : Mr. Bingley, ses deux soeurs, le mari de l’aînée et un autre jeune homme.

Hein ? Mais depuis quand Mr. Bingley a CINQ SOEURS ?


Avoir des enfants au temps de la Régence

Jane Austen n’en parlera plus jamais par la suite. Seules Caroline et Louisa deviendront des personnages, encore que Louisa soit si insignifiante qu’elle et son mari ont carrément disparu dans le film de 2005.

Il est possible que ces chiffres soient tout simplement des déformations dues aux commérages de Meryton (le téléphone arabe devait fonctionner à plein régime, à l’époque !), mais ça a le mérite d’amener la question de la taille des fratries dans les familles.

Dans La renaissance de Pemberley, j’ai décidé d’assumer pleinement le fait que Bingley a bel et bien cinq soeurs, et non pas seulement deux, pour la simple raison que c’est beaucoup plus cohérent avec l’époque.

Songez aux mariages autour de 20 ans (pour les femmes surtout). À l’absence de contraception. À la nécessité d’avoir beaucoup d’enfants en raison du taux élevé de mortalité infantile (et de mortalité tout court ! vu la médecine approximative, on pouvait décéder à tout âge).

À moins de fausses couches ou de complications liées à la grossesse, une femme en bonne santé faisait un enfant tous les 2 ans environ.

Il est facile de noter cette régularité en observant l’écart d’âge entre les membres d’une fratrie : s’il y a plus de 2 ans, c’est souvent que la mère a fait une fausse couche ou que l’enfant est mort en bas âge (à moins que le mari soit parti à la guerre, mais vous comprenez mon point !). En étant mariée jeune et en étant fertile pendant une bonne grosse vingtaine d’années, ce n’était pas compliqué de faire 6, 8 ou 12 enfants, la moyenne étant de 8.

C’était d’ailleurs quelque chose qui pouvait étonner et faire jaser les pipelettes… :

Tiens, madame la voisine n’est toujours pas grosse ? Pourtant, son petit dernier va bientôt avoir 3 ans !


En conclusion

À l’époque, on avait de grandes familles. Pour Bingley, avoir cinq soeurs est tout à fait crédible, beaucoup plus, en fait, que de n’en avoir que deux.

Ce qui m’amène à souligner deux autres incohérences du récit : l’étonnant écart de 11 ans entre Darcy et sa soeur Georgiana, et le fait que Anne de Bourgh soit fille unique. Ça n’a pas de sens et pourtant Jane Austen n’explique rien à ce sujet. C’est donc un trou qu’il faut combler.

Je l’ai fait à ma façon dans La renaissance de Pemberley. À vous d’imaginer la vôtre ! 😉

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