Tout le XIXe siècle

Trois jeux de Noël au XIXe siècle

Pour une fois que je passe les fêtes de fin d’année en France, je n’ai pas beaucoup de temps à consacrer à ce blog, alors je vous propose (un peu en retard, hum… 😉 ) de vous présenter trois jeux auxquels on jouait à Noël dans les pays anglo-saxons au XIXe.

Puisque le but, à cette période de l’année, est de se réunir en famille ou entre amis et de se divertir ensemble, on jouait à des jeux de société : soit des « jeux de tables » (où il faut des pions et un plateau de jeu), soit des « jeux de groupes » (avec peu ou pas du tout de matériel) tels que des mimes, des charades, des jeux où il faut faire deviner quelque chose aux autres joueurs, des jeux où les joueurs se trouvent en position ridicule pour faire rire tout le monde, des « jeux de bisous » servant d’excuse aux jeunes gens pour se rapprocher, et l’intemporel colin-maillard auxquels jouaient petits et grands en essayant de ne pas se faire un oeil au beurre noir en rencontrant un coin de meuble par inadvertance.

Les trois que je vous présente ci-dessous sont également de grands classiques du Temps des Fêtes, et il y a de quoi se demander où ils sont allés chercher des idées pareilles… 😉

À PROPOS DE NOËL, j’ai déjà fait plusieurs articles pour parler de traditions, de nourriture, de cadeaux ou de décorations. Vous retrouverez tout ça ici.


1. Bullet pudding

Dans un plat, on réalise une montagne de farine, haute et compacte (parfois en la démoulant comme si on faisait un château de sable) et on dépose au-dessus une pièce de monnaie, ou une… balle. Oui, oui, une balle de fusil. On a besoin d’un objet qui soit petit, mais assez lourd pour pouvoir tomber quand il le faudra. Je suppose qu’au début on utilisait plutôt des pièces, mais si ce jeu a été rendu populaire auprès de soldats, alors une balle de fusil faisait parfaitement l’affaire, d’où le nom du jeu : bullet pudding, soit « gâteau à la balle ».

Chaque joueur coupe tour à tour une part du « gâteau » en prenant soin de ne pas faire bouger la balle. Mais à mesure que la pile de farine diminue, elle devient moins compacte et moins stable, ce qui fait que tôt ou tard un joueur finira par faire tomber la balle. Puisqu’il est perdant, son gage est d’aller la récupérer… avec la bouche ! Ce faisant, il va forcément se barbouiller le visage de farine et faire rigoler tout le monde.

Dans le film Emma de 2020, le personnage de Harriet joue au bullet pudding avec un groupe d’amies, en utilisant une pièce de monnaie. Comme c’est Harriet qui perd, elle doit aller récupérer la pièce et finit avec la face toute enfarinée, pour le plus grand désespoir d’Emma qui ne trouve pas ça digne d’une jeune fille élégante et bien élevée.
Démonstration en vidéo

2. Are you there, Moriarty ?

Deux joueurs sont étendus au sol, sur le ventre. Ils sont tête à tête, à une distance d’environ un mètre (en général ils se tiennent la main), avec chacun les yeux bandés et armé d’un journal roulé ou d’un coussin (qu’ils vont utiliser pour frapper sans faire mal).

Le joueur A commence en disant « Êtes-vous là, Moriarty ? », ce à quoi le joueur B répond « Oui ! ». A essaye alors de frapper B en lui donnant un coup de journal, que B va tenter d’esquiver en se tortillant ou roulant d’un côté ou de l’autre. Si A n’y arrive pas, alors c’est au tour de B de demander « Êtes-vous là, Moriarty ? », et ainsi de suite jusqu’à ce qu’un des deux soit touché, et éliminé. Il est alors remplacé par un nouveau joueur. Le but est d’éviter les coups pour rester dans le jeu le plus longtemps possible.

Une variante peut aussi se faire avec les deux joueurs assis face à face (et cherchant toujours à se donner des coups de journal à l’aveuglette). Un genre de piñata à la sauce victorienne, quoi ! 😉

Sur cette photo du début du XXe, les deux joueurs au premier plan essaye de se frapper à coups de coussins.
Démonstration en vidéo

3. Squeak, piggy, squeak !

Un groupe de joueurs d’assoit en rond sur des chaises : ce sont les Cochons. Un autre joueur se tient debout au milieu d’eux, avec les yeux bandés : c’est le Fermier.

Le Fermier tourne plusieurs fois sur lui-même pour se désorienter, puis, toujours à l’aveuglette, il s’assoit sur les genoux d’un des Cochons et lui dit « Crie, petit cochon, crie ! ». Ce dernier doit alors pousser des cris de cochon, et le Fermier doit deviner, d’après ces cris, qui est cette personne. Si le Fermier devine correctement, alors le Cochon devient le nouveau Fermier. Sinon, les Cochons échangent leurs places pour se mélanger encore plus, et on refait un nouveau tour où le Fermier doit encore s’asseoir au hasard sur une paire de genoux.

Il existe des variantes avec d’autres bruits d’animaux (une vache, un lion…), et aussi avec un coussin que le Fermier doit poser sous ses fesses avant de s’asseoir sur les genoux d’un des Cochons, afin de préserver au maximum l’anonymat de celui-ci.

Cette gravure représente clairement une partie de « Squeak, Piggy, squeak ! »… où le Fermier en profite pour tripoter un peu la demoiselle sur laquelle il s’est assis (extrait du magazine Le Bon Genre, début XIXe).
Démonstration en vidéo

En conclusion

Est-ce que ça vous a donné des idées pour votre prochain réveillon ? Vous allez faire sensation ! N’oubliez pas non plus de jouer aux deux autres jeux de groupe typiques de Noël dont j’ai déjà parlé, le Snapdragon (ici) et la Chasse à la pantoufle (ici), et si vous faites une partie de colin-maillard, faites gaffe aux coins de meubles… 😉

Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter à tous un joyeux Noël !

SOURCES :
What’s With the Game in Emma Where They Destroy a Sandcastle Made of Flour?
Back in my time - 19th Century Parlor Games
Bullet Pudding and other games of chance
The Entertainers: Parlor Games
Are you there, Moriarty? And other hilarious parlour games
Wikipedia - Are you there, Moriarty ?
Wikipedia - Squeak piggy squeak
Victorian Parlour Fun & Games
YouTube - Victorian Christmas, how to play parlour games
Livre - The book of parlour games, par Catharine Harbeson Waterman (1853)
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